Si je suis une chose, c’est un fan fini de TikTok.
J’admets par contre avoir eu une boule à la gorge quand il a fallu l’intégrer à mon métier de rédacteur. Comment prendre tout ce que je trouve excitant de la plateforme et l’adapter au carré de sable complexe d’une marque ? Voici des leçons qui se sont imposées à moi en explorant ce territoire avec des entreprises d’ici.
TikTok repose en grande partie sur des références à la culture populaire. Une tendance qu’on retrouve partout un matin peut être née d’une vidéo YouTube d’il y a 5 ans qui, elle, reprenait un segment d’épisode de Virginie en 2002. C’est difficile de fake it till you make it quand vient le temps de s’approprier ces tendances à notre sauce.
La clé, c’est donc de devenir ou de s’entourer de passionné·es qui ont de la corne sur le pouce tellement elles et ils scrollent sur la plateforme. En adoptant la plateforme au quotidien, on voit évoluer l’utilisation de sons, de filtres et de gabarits vidéo qui peuvent prendre de l’ampleur, s’essouffler, ou complètement changer à tout moment. On se rappelle la justicière « ATTENZIONE PICKPOCKET » qui a dominé la plateforme pendant des semaines pour s’éclipser en un instant quand ses affiliations politiques ont été dévoilées par des utilisateur·trices curieux·euses.
Petite leçon d’histoire récente : TikTok a longtemps été un no man’s land sans pub ni contenu de marque et, après leur expérience Facebook et Instagram, les utilisateur·trices s’en réjouissaient. Quand les marques ont fini par inévitablement y faire leur chemin, le monde était gossé. Et je comprends. Dans un climat comme celui-là, le contenu devient notre meilleure pub.
Qu’est-ce que ça implique ?
Ça jase en maudit dans les commentaires et personne ne veut parler à un·e préposé·e au service à la clientèle.
C’est payant de cibler des intérêts pointus. Faire une blague qui ratisse trop large, ça peut compromettre l’humour. Une cliente que j’estime particulièrement m’a dit dans un brief TikTok : « Si je ne comprends pas les jokes, vous êtes sur la bonne voie ». J’ai su à ce moment-là qu’on allait avoir du fun.
Sur des plateformes traditionnelles, on a l’habitude de retourner à notre guide de marque pour s’assurer que tout est peaufiné au quart de tour. On choisit des chemins plus sécuritaires pour s’éviter les foudres de sa ou son boss. Sur TikTok, c’est le contraire. S’accorder une plus grande souplesse devient intéressant. Et utiliser des codes esthétiques plus proches de ceux des utilisateur·trices l’est tout autant.
Les entreprises auront beau tout faire pour se rapprocher d’un comportement d’utilisateur·trice « citoyen·ne », elles n’en seront jamais un. Ç’a été un deuil à faire.
Dans mes premières expériences avec des marques, j’ai poussé à outrance pour qu’on se fonde à 100 % dans le feed des utilisateur·trices. Sans surprise, les obstacles fusaient de partout : on ne peut pas utiliser ce son protégé, on n’a pas le temps de tourner ou d’avoir les appros nécessaires pour profiter du momentum, on doit absolument inclure une mention qui vole le punch, etc.
Les images et sons utilisés par la communauté viennent avec un niveau de risque beaucoup plus grand pour une personne morale qui souhaite faire partie de la gang.
En tant qu’expert·es, il faut comprendre que chaque marque a sa propre tolérance au risque pour une variété de raisons valides. Une fois cette notion assimilée, j’ai commencé à prendre les «contraintes» comme des paramètres créatifs qui mènent à une recette unique. Ç’a été un grand moment « Ah-HA ! » pour moi.
L’angle, c’est un peu la solution créative qui émerge de notre recette : un point de vue unique de la marque, bâti sur ses moyens, ses ambitions et qui la rend mémorable.
Avec la Banque Nationale, on nous avait donné comme défi d’inclure une mascotte (une peluche en forme de logo) dans nos tiktoks. Aussi charmante soit-elle, comment réussir à tirer notre épingle du jeu en arrivant sur une plateforme anti-pub avec un gros logo ? En créant le bon red flag de l’internet. On s’est collé·es à un code evergreen du web (le fameux red flag) qui est devenu notre véhicule pour une variété de messages comiques et/ou informatifs. Et ça marche tellement bien !
Autre exemple. Avec Mondou, on cherchait à générer du brand love, mais avec des mécaniques qui permettent de mettre de l’avant notre produit, au besoin. Notre solution? Passion Niche. Une websérie TikTok où des animaux présentent des « chroniques » bouffe, déco, mode, etc. Un genre de Queer Eye animalier ! Là aussi, on s’est retrouvé·es avec un résultat fidèle aux codes du web, agrémenté d’une touche unique qui répond aux objectifs de l’annonceur.
J’ferai pas semblant que se lancer sur une plateforme aussi unique est simple. Il y a des connaissances à acquérir, à déconstruire et des défis à surmonter. Mais la visibilité de notre travail peut être astronomique. Surtout quand on la compare à nos coûts de production !
Méditez ça et, si le cœur vous en dit, lancez-vous dans l’aventure sans retenue. Je vous promets que la boule dans la gorge finit par partir.
10-4.